Gilbert Klopfstein nous a quittés le 2 novembre 2006 des suites d'une
longue maladie.
Nous nous associons à la douleur de ses proches
Formation
Gilbert Klopfstein a commencé sa carrière
de pilote très jeune, il est breveté planeur à 15 ans, puis pilote à 17.
Il part aux états unis suivre une
formation de pilote
cadet dans l'US Air Force en 1953, il y acquiert à 20 ans ses
premiers galons de pilote. Il passe ensuite par toute une série
d'écoles prestigieuses.
- Sup'Aéro puis Sup'Elec (major).
- Ingénieur Militaire de l'Air, recrutement par concours.
- Formation Pilote de Chasse à l'école de Meknès (major).
- Formation pilote et ingénieur d'essai à l'EPNER.
Caractéristiques individuelles
Passionné d'aéronautique et de tout ce qui est technique (de la mécanique à l'électronique, en passant par l'aérodynamique, la thermodynamique,…).
Excellent pilote, major de sa promotion à Meknès, d'une très grande adresse manuelle au service d'une réflexion permanente sur tous les aspects techniques du vol. Réfléchir, pendant qu'il maniait les commandes à tous les phénomènes physiques concernant le comportement de son avion et de ses équipements était pour lui une seconde nature.
Compétence et culture technique approfondie ne l'entraînaient pas à des réflexions de type " savant cosinus ", mais au contraire à une simplification aux aspects essentiels basés sur un solide bon sens.
Capacités didactiques remarquables : excellent formateur (très vivant même avec certains aspects passionnels et provocateurs de son caractère).
Sa carrière
Première affectation : le détachement du CEV à Colomb-Béchar, fin 1959. Chargé des essais d'engins air-air et air-sol, il a en particulier joué un rôle actif dans la mise au point du Matra 530.
Muté en 1962 à la section avions du CEV, il y fut chargé par Pierre TAMAGNINI des essais du Bréguet 941, puis du Mirage III E.
Lors du lancement du programme Concorde, il reçut la mission d'étudier, de faire modifier et de mettre au point le Mirage III B 225 à stabilité variable qui avait été lancé par le STAé/EG (Pierre LECOMTE) pour l'aide au développement du Transport Supersonique.
L'avion à stabilité variable, avec sa capacité remarquable de démonstration des paramètres de la mécanique du vol et de leur influence sur les qualités de vol et le pilotage, a sans doute été pour lui déterminant dans ses réflexions sur le pilotage qui l'on conduit à développer les concepts d'utilisation du vecteur vitesse, de l'incidence et de l'énergie totale.
En 1969, il fut désigné (action de Jean FORESTIER en particulier), responsable de la conception et du développement d'un avion de démonstration pour les élèves de Sup'Aéro : le Nord 262 n°55.
Cet avion a servi à illustrer en vol pour de nombreuses générations d'élèves les divers aspects de la mécanique du vol.
Gilbert KLOPFSTEIN a alors équipé cet avion d'un matériel destiné à étudier les principes de figuration d'informations en tête haute et en tête basse dont il avait été le concepteur.
En 1972, ces réalisations ont été présentées avec cet avion à l'etat-Major de l'U.S.A.F. à Wright Patterson Air Force Base et au Laboratoire d'essais en vol du Massachussetts Institute of Technology (M.I.T.), à Boston.
Le Nord 262 n°55 sur la "Wright Patterson Air Force base, Ohio"
La réaction de ces deux organismes fut proches de l'enthousiasme en préconisant l'équipement des avions américains avec du matériel basé sur les concepts présentés. La suite des travaux consista à étudier l'impact que pouvait avoir l'apparition de la technologie numérique sur l'équipement des avions : il s'agissait en particulier de tirer le meilleur parti des nouvelles possibilités de mesure et de calcul.
Le résultat de cette série d'études, comportant notamment le pilotage direct de la pente et de la route, a donné lieu à 4 rapports d'essais très positifs du CEV.
Son apport technique
Concepts de vitesse-air et d'énergie totale appliqués au pilotage en tête haute à travers un collimateur. Association de ces paramètres en tête haute à un figuration synthétique du monde extérieur (y compris et surtout la piste d'atterrissage) de facon à uniformiser la technique de pilotage quelles que soient les conditions météorologiques.
La majeure partie de ses idées, qui ont mis beaucoup de temps à percer car elles choquaient les habitudes, est maintenant appliquée sur la majeure partie des avions d'armes de part et d'autre de l'Atlantique, sur les navettes spatiales américaines, sur de nombreux avions de ligne américains et sur le Falcon 2000.
Une partie l'est également sur les Airbus.
Commentaire général
Gilbert KLOPFSTEIN a quitté la DGA (congé du PN) en 1982.
L'Histoire et les chroniques nous ont appris que les grands esprits créatifs et novateurs s'intégraient mal dans les grandes structures traditionnelles, présentant inévitablement certaines rigidités, et qu'ils se heurtaient souvent à l'incompréhension de leur environnement.
Gilbert KLOPFSTEIN n'a pas échappé à ce cliché et a rencontré, tout au long de sa carrière dans l'administration, de grandes difficultés à faire admettre ses idées, avec en particulier - sauf de rares exceptions - une hostilité marquée de la part des personnels navigants dont il dérangeait les habitudes. Malgré un certain nombre de rapports positifs émanant du CEV, ses principes de pilotage, largement appliqués aujourd'hui, aussi bien dans les avions civils que militaires, ont mis un temps important à percer et, nul n'étant prophète en son pays, ont été appliqués initialement aux Etats-Unis.
Mais après tout, n'est-ce pas un témoignage de l'importance de l'innovation ?
L'esprit entièrement focalisé vers ses réflexions techniques, Gilbert KLOPFSTEIN ne s'est jamais soucié de l'évolution de sa " carrière " au sens traditionnel du terme et, meurtri par les querelles qu'il suscitait régulièrement, décida de quitter le Corps en 1982. Il s'est ensuite consacré principalement à l'enseignement, formant des générations enthousiastes d'élèves de l'ENSAé et de l'ENAC à la mécanique du vol et au pilotage moderne.
L'Ingénieur Général Emile BLANC, ancien DGA
L'ingénieur Général Jean MONFORT
Gilbert Klopfstein (à droite) et Edouard Fages (CdB A320 Air France) regardent un film de dépouillement
de vol d'essais d'appontage de Super Etendard pris par un caméra montée à bord à 90° de l'horizontale,
ce qui explique la position bizarre de leur tête... Il aurait fallu tourner l'écran...
A lire aussi
-
Présentation de René Lami
-
Gilbert Klopfstein - Le pére du Head Up Display (HUD)